Agatha Christie, Duchesse de la Mort

La femme de tous les records…

Agatha Christie, Duchesse de la Mort comme elle aimait être surnommée, est encore aujourd’hui l’autrice la plus lue au monde. Elle a écrit 66 romans, dont 6 sous pseudonyme, 150 nouvelles, 25 pièces de théâtre, 1 autobiographie, 1 livre de souvenirs. Elle a vendu plus de 4 milliards de romans dans 7233 traductions. Sans parler des adaptations au cinéma, en série, en BD…

Mais qui était-elle ? Si de nombreuses biographies existent déjà, j’avais envie d’écrire sur elle. Pas seulement pour l’admiration que j’ai pour son oeuvre. Mais aussi pour la femme (féministe avant l’heure, créative, manipulatrice pour ses lecteurs, fine connaisseuse de la psychologie humaine). J’avais envie de transmettre ce que je retiens d’elle au travers de toutes mes lectures de ses romans, des films, séries, podcasts, émissions TV dont je ne me lasse pas.

Plaisirs de jeunesse…

Née en 1890 à Torquay au Royaue-Uni, Agatha Miller trouve d’abord l’inspiration dans la lecture dont elle est friande. Fan des romans de Sir Arthur Conan Doyle dont elle dévore les aventures de Sherlock Holmes et du Docteur Watson, qu’elle découvre grâce à sa soeur. Un amuse-bouche policier prêt à devenir plus tard son met favori ? Enfant rêveuse, solitaire et timide, elle se met à écrire précocement. Beaucoup. Des nouvelles inspirées par le métier de spirite de sa mère, mais pas seulement. Très observatrice, elle s’éponge de la société Victorienne dans laquelle elle évolue. Les personnages qui l’entoure peupleront ses écrits jusqu’à la fin de ses jours. L’image de sa grand-mère qui la fascine. Les domestiques, à commencer par sa «Nursy » française, mais aussi la gouvernante, le majordome, la cuisinière…

Mais son enfance est également marquée par un premier drame familial, la mort de son père, alors qu’elle n’a que 10 ans.

Femme en devenir…

Quelques années passent et Agatha devient une jeune femme, prête à trouver un mari. Alors en voyage en Egypte avec sa mère, elle rencontre l’aviateur Archibald Christie, qui devient son mari en 1914. Mais la guerre éclate et, tandis qu’il part au front, Agatha devient bénévole comme aide-soignante au dispensaire de la croix-rouge installé à la mairie de Torquay. Elle se retrouve au contact de nombreux réfugiés Belges, notamment l’un d’entre eux avec un crâne en forme d’œuf et une drôle de moustache, qui deviendra l’image de son fameux détective Hercule Poirot. Elle passe avec succès l’examen pour devenir apothicaire (précurseur du pharmacien, il prépare et distribue les drogues utiles à la santé). Elle se découvre alors une passion pour ces drogues, surtout les toxiques. Les poisons deviendront légions dans ses romans : bromure, cyanure de potassium, acide prussique, thallium… De quoi constituer une belle armoire à pharmacie. Mais l’autrice ne se contentera pas de n’utiliser que le poison, elle aimera varier les plaisirs et usera tout à tour d’armes tranchantes (type couteaux, hache, broche, stylet, pic à sucre (une idée pour Verhoeven plus tard 😉 ; d’armes à feu ; d’armes contondantes (sacs de sable, lourdes pierres, mur qui s’effondre, canne alourdie de plomb), ou encore la strangulation. La chute figure également à une belle place sur le podium (et la créativité de l’autrice permet encore une fois de varier les plaisirs : falaise, escalier, pont…).

En 1917, sa soeur la met au défi en lui affirmant qu’elle ne sera pas capable d’écrire un roman mystère. Défi relevé avec son premier roman, La mystérieuse affaire de Styles, qui sera d’abord refusé par les éditeurs avant de trouver preneur en 1919 et d’être publié. Agatha Christie, l’autrice, se révèle au public. Au passage, l’éditeur ne manque pas de l’arnaquer en lui commandant 5 romans pour lesquels elle sera, pardonnez-moi l’euphémisme,  «modestement rémunérée» …

Et le surf découvrit la femme…

En 1922, elle part faire le tour du monde pendant presque un an en compagnie de son mari. De passage en Afrique du Sud, elle découvre le Surf (elle devient alors la première femme British à chevaucher une planche…). Sport qu’elle trouve facile et amusant alors. Pourtant, à Honolulu l’histoire est toute autre, elle va devoir faire preuve de persévérance et de discipline pour devenir experte et avoir la fierté de revenir à la plage en étant restée debout et sans être tombée de sa planche. Elle déclare dans son autobiographie : «Rien de tel que de filer sur les flots à ce qui vous semble être une vitesse de 200 à l’heure pour arriver en souplesse sur la plage et s’enfoncer doucement dans les vagues mourantes. C’est l’une des sensations physiques les plus parfaites que j’aie jamais éprouvées. »

Fin d’un chapitre

En 1926 sa mère meurt. Après son enterrement, elle vit quelque temps dans la maison parentale à Torquay, tandis qu’Archie travaille et vit à Londres. Elle raconte dans son autobiographie ressentir alors un immense chagrin, de la solitude, et du surmenage. Symptômes de dépression. Elle ajoute un peu plus loin, qu’elle se sent telle Alice au pays des merveilles, un peu dissociée à certains moments, comme quand elle s’apprête à signer un chèque et ne parvient pas à se souvenir de son nom. Conséquence de sa dépression ou manipulation habile du lecteur face à l’événement qu’elle s’apprête à vivre ? Lors d’une visite, son mari lui avoue qu’il a une maitresse, sa secrétaire, depuis plusieurs mois, et qu’il veut divorcer. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

La disparition

Le 3 décembre, elle laisse sa fille aux servantes et quitte le domicile. Le lendemain, sa voiture accidentée est retrouvée sur une route. Pas de trace de l’autrice. De grands moyens sont mis en oeuvre pour la rechercher. Même son auteur préféré, Sir Conan Doyle, participe à sa recherche. Ce n’est que 10 jours plus tard qu’elle est retrouvée grâce à un employé de l’hôtel où elle séjourne, qui prévient la police. Hôtel où elle s’enregistrée au nom de la maitresse de son mari. Quand Archibald la rejoint, elle ne le reconnait pas, ni ne se souvient de son nom à elle. Elle sera hospitalisée quelques temps pour dépression après cet épisode qui sera qualifié de fugue dissociative. Pourtant, officieusement, elle aurait confié à un détective qu’elle avait mis en scène sa propre disparition pour punir son mari (et créer un grand coup de comm pour son roman à sortir, Le meurtre de Roger Ackroyd). Coup monté ou pas, son roman se vendra à 8000 exemplaires, gros succès donc. À partir de là, elle écrira 1 à 3 romans par an.

Nouvelle vie pour une nouvelle femme

Le divorce prononcé, elle décide de voyager en Orient (Syrie, Iraq, Turquie, Égypte…). Au cours d’un retour en Orient-Express, elle écrit le roman donnant naissance à Miss Marple (vieille dame anglaise qui deviendra aussi célèbre que Poirot), intitulé L’Affaire Protheroe. D’autres personnages suivront : le couple Beresford, Harley Quinn ou encore Parker Pyne… Agatha sait se réinventer !

Elle rencontre son nouveau mari, l’archéologue Max Mallowan, qu’elle épouse quelques temps plus tard. Cette période, les années 30, est très prolifique, et voit naitre plusieurs de ses meilleurs romans : Meurtre en Mésopotamie, Le crime de l’Orient-Express, Mort sur le Nil, Ils étaient 10 (roman le plus vendu au monde encore à ce jour).

Toujours prête à relever de nouveaux défis créatifs, elle va écrire 6 romans sentimentaux sous le pseudonyme de Mary Westmacott, ou encore des pièces de théâtre, dont La souricière (pièce qui détient le plus grand nombre de représentations consécutives au monde depuis sa création en 1952).

Dans les années 40, elle écrit ses derniers romans dont le mythique Hercule Poirot quitte la scène, ultime enquête du détective Belge qui trouve la mort dans une intrigue où il affronte le meilleur tueur qu’il ait connu. Ainsi que La dernière énigme, qui constitue la dernière enquête de Miss Marple, bien que celle-ci ne meurt pas. Ces romans sont enfermés dans le coffre d’une banque à Londres au début de la seconde Guerre Mondiale et y resteront jusqu’à leur parution en 1975 pour lui et 1976 pour elle. Fait notable pour un personnage de fiction, à la mort d’Hercule Poirot, le New York Times publie sa nécrologie. Le journaliste Thomas Lask débute son article par «Hercule Poirot, détective belge ayant acquis une renommée internationale, est mort en Angleterre. Son âge était inconnu.» 

Le 12 janvier 1976, Agatha rejoint son héros de l’autre côté du miroir de notre réalité…

Mon top romans

• Le crime de l’Orient-Express (pour le génie de la Reine du Crime à me berner et j’adore ça, pour l’humanité de Poirot)
• Mort sur le Nil (pour l’ambiance si bien décrite, l’intrigue prenante)
• Le meurtre de Roger Ackroyd (pour le génie de Christie à réinventer les codes du polar)
• Ils étaient 10 (pour le côté huis-clos et la fin surprenante)
• L’heure zéro (pour le côté psychopathe)
• Hercule Poirot quitte la scène (pour la sortie si classe de Poirot, la boucle qui se boucle)
• La mystérieuse affaire de Styles (Parce que c’est le premier)
• Un cadavre dans la bibliothèque (parce que c’est mon premier Marple, trouvé dans la bibliothèque de ma grand-mère)
• Le vallon (pour sa finesse psychologique)
• Meurtre en Mésopotamie (pour l’ambiance en Égypte si bien décrite)

Ce top reste très subjectif, j’en ai lu beaucoup, mais pas la totalité, et je me suis lancée pour challenge de tous les relire dans l’ordre de parution (merci le podcast Agatha Crimstie), dans les prochains mois. Le classement évoluera donc peut-être…

Sources : podcast portraits de Lire Magazine / Wikipédia / Biographie  Les mille vies d’Agatha Christie de Béatrix de L’Aulnoit / Autobiographie d’Agatha Christie / Article Le poison, l’arme du crime préférée d’Agatha Christie paru dans le JDD du 8 janvier 2016 / le site officiel de l’autrice https://www.agathachristie.com

Recommandations : tous les livres de l’autrice, la série Hercule Poirot, la série Miss Marple, la série française Les petits meurtres d’Agatha Christie (avec une préférence pour la saison 2) les adaptations cinéma de ses romans, le podcast Agatha Crimstie … Ça laisse déjà de quoi faire…

Et si vous avez des conseils lecture, ciné, série, podcast à me recommander, n’hésitez pas à les partager en commentaire. On n’a jamais assez de la Duchesse de la Mort 🙂